L’Art Brut enfreint-il les limites de la sensibilité du public ?


L’Art Brut enfreint-il les limites de la sensibilité du public ?

Création de Marc Moret

Written by Lucienne Peiry in Critique

10 juillet 2012

Faites de restes humains et animaux, les créations de Marc Moret ont soulevé des questions essentielles lors d’une exposition présentée en 2009 à la Collection de l’Art Brut, à Lausanne. Les œuvres de ce créateur fribourgeois – dont le caractère spirituel et sacré est manifeste – ont été montrées pendant huit mois, sans avertissement particulier pour les visiteurs. Cette présentation a toutefois engendré une réflexion fondamentale.

La mort a-t-elle sa place dans un musée? L’Art Brut enfreint-il les limites de la sensibilité du public? Fallait-il montrer l’univers parfois repoussant de Marc Moret, où se mêlent os de bêtes calcinés, mèches de cheveux et boyaux distendus? La Collection de l’Art Brut estime que la présentation de ce type d’ouvrages est d’une importance de premier ordre, car elle engage le public à découvrir des oeuvres qui font appel aux pulsions créatives archaïques et réveillent la part secrète et obscure de nos propres vibrations intérieure.

Marc Moret porte atteint à un malaise social souterrain que l’anthropologue Edgar Morin appelle «la crise contemporaine de la mort». L’exposition de telles productions est donc essentielle puisqu’elles défient le tabou et nous renvoient à notre condition humaine.

La Collection de l’Art Brut, à Lausanne, a soulevé des questions essentielles lors d’une exposition temporaire intitulées «Art Brut fribourgeois». Aux œuvres d’une dizaine d’auteurs d’Art Brut fribourgeois présentées dans les salles répondaient des productions relevant de la tradition religieuse et de l’imagerie populaire, comme des ex-voto ou des poyas. Ainsi, des travaux de différents registres ont été exposés das le même espace, invitant les visiteurs à établir des généalogies culturelles et à repérer d’éventuels cousinages entre les champs différents que sont l’Art Brut, l’art religieux et l’art populaire. Dès lors, des filiations pouvaient se lire en filigrane entre ces travaux, dans les sujets iconographiques choisis, les techniques et les procédés…


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