Sur les traces de Guo Fengyi


Sur les traces de Guo Fengyi

Guo Fengyi, Collection de l'Art Brut

Written by Lucienne Peiry in Découverte Le Carnet

10 octobre 2014

Le corps humain est omniprésent dans l’œuvre de l’auteur chinoise Guo Fengyi, dont il constitue le motif iconographique privilégié. Cette dominante s’explique logiquement. L’expérience personnelle de la maladie et de la souffrance lui procure une sensation aiguë de son corps, plus particulièrement des zones douloureuses. Celle-ci est prolongée et intensifiée par la pratique du qigong qui ouvre dès lors une voie nouvelle, amplifiant considérablement la perception générale interne du corps et de l’espace – une présence accrue à soi-même, aux choses, au monde-, que la dessinatrice peut projeter sur le papier et à laquelle elle peut donner une vie symbolique.

Personnages chinois historiques (l’impératrice Wu Zetian) ou mythologiques (la Fée de la lune), divinités (Bouddha), figures allégoriques, créatures imaginaires ou autoportraits se déploient dans une verticalité qui s’affirme rapidement, devenant parfois vertigineuse, puisque les fines feuilles de papier de fibres végétales peuvent atteindre plus de dix mètres de hauteur. Ces silhouettes majestueuses, au corps allongé, prennent forme dans la symétrie, latérale et axiale, par un traitement pictural très raffiné, où d’innombrables coups de pinceau successifs, tracés à l’encre, se juxtaposent et se superposent pour former un système complexe de lacis précis et délicats. Les couleurs, peu nombreuses – le rouge, le jaune, le vert et le bleu accompagnent le noir – se juxtaposent et s’entrelacent, provoquant quelquefois de légères vibrations optiques. En faisant usage de teintes si soutenues, Guo Fengyi va consciemment à l’encontre de la tradition et assume un geste qui apparaît comme une provocation.

Les peintures de Guo Fengyi révèlent des paysages corporels internes troublants.

Plusieurs d’entre elles sont à découvrir sur de longs rouleaux accrochées comme des étendards poétiques à la Collection de l’Art Brut, à Lausanne. Lucienne Peiry avait rencontré la créatrice à plusieurs reprises, à Xi’an au centre de la Chine.

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