Darger fascine les artistes contemporains


Darger fascine les artistes contemporains

Henry Darger. Collection de l'Art Brut, Lausanne

Written by Lucienne Peiry in Le Carnet Portrait

28 juin 2016

Le metteur en scène et acteur Omar Porras évoque son attachement pour l’Art Brut et pour les compositions de l’Américain Henry Darger.

« Le face à face avec une œuvre d’art brut, c’est une expérience qui nous approche au sens premier et au plus naturel de la beauté. Elle nous permet d’entendre les rugissements furieux de la pensée humaine qui se révolte. Elle nous dévoile le rituel sacré qui libère les peurs et les joies immensurables qui dorment dans la solitude et la douleur de l’enfermement cosmique de l’être humain.

 

       Chaque gramme de matière, chaque geste pictural s’élève au rang de l’extraordinaire pour nous souffler la promesse d’un futur désiré, détaché de la froideur du marbre bien poli et des concepts  révolus du passé.

 

       J’entends dans l’œuvre de Henry Darger, comme dans L’Éveil du printemps de Frank Wedekind les pas, les rires, les cris et les chants d’une civilisation de créatures enfantines qui refusent l’inconscience tyrannique d’un idéal adulte, excessivement éloigné de l’émerveillement. »

 

Omar Porras

Juin 2016

 

Ce texte figure dans l’ouvrage « L’Art Brut » de Lucienne Peiry qui va paraître en septembre aux éditions Flammarion, à Paris.

Acteurs et comédiens sont particulièrement sensibles aux productions d’Art Brut. Travaillant continuellement sur le fil du rasoir et dans le dépassement de soi, nombreux sont ceux qui y puisent une inspiration féconde. Isabelle Huppert, qui a fréquenté régulièrement la Collection de l’Art Brut, à Lausanne, un « endroit très troublant qu’[elle ne se] lasse pas de visiter », affirme « avoir une passion pour ce musée ». A ses yeux, cet art « pose tellement de questions sur la normalité, la folie […], sur la conscience, sur l’oubli de soi, le contraire de l’oubli de soi, sur ce qu’on appelle une œuvre d’art ». La comédienne française Anne Benoit explique qu’elle y puise l’énergie et l’inspiration nécessaires pour incarner les personnages puissants de tragédies, comme Hermione dans Andromaque ou Agrippine dans Britannicus.

Les créations d’Art Brut conduisent certains à des interrogations philosophiques. Le comédien français Alain Fromager les envisage comme des « expressions primordiales […] qui questionnent l’art dans l’origine même de sa manifestation. Face à elles, [il a] le sentiment de toucher à des formes premières ». Les écrits et les peintures de Samuel  Daiber ou de Jeanne Triper constituent pour lui « une grande source d’inspiration qui [lui] permettent de retrouver dans [son] travail l’essence du jeu, l’urgence et la nécessité du geste».


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